Le lundi 6 décembre dernier, l’organisme L’Arc-en-ciel des Seigneuries dévoilait les résultats d’une étude menée au cours des derniers mois. Le cadre de cette recherche? Les besoins en logements sociaux pour les personnes souffrant de problèmes de santé mentale dans la région de Boucherville et des municipalités de la MRC de Marguerite-D’Youville.
Lorsque la chercheuse Chiara Benetti a commencé sa recherche plus tôt cette année, certains faits indéniables pouvaient déjà être inscrits dans la colonne des acquis.
La crise des loyers et la criante pénurie de logements sociaux qui existent dans toute la Communauté métropolitaine de Montréal font partie de ces données répertoriées et déjà bien documentées au fil des dernières années.
Mais d’autres données récoltées lors des rencontres des dix-huit participants de Boucherville et de la MRC de Marguerite-D’Youville souffrant de problèmes de santé mentale, de leurs proches et de professionnels du milieu ont pu étonner. Étonner mais aussi enrichir du même coup cette grande réflexion à laquelle se sont attaqués L’Arc-en-Ciel des Seigneuries et ses partenaires ralliés derrière le projet.
« Il y a une réelle volonté pour ces personnes de demeurer sur le territoire, explique Mme Benetti. C’est une des raisons pour laquelle nous avons fait cette étude au départ. On ne veut pas qu’elles soient forcées de s’éloigner. Ce qui est ressorti au fil de nos rencontres, c’est qu’il y a un sentiment d’appartenance sociale, mais aussi d’appartenance au milieu. C’est un aspect extrêmement important pour eux de sentir qu’ils ont leurs repères dans le secteur où ils habitent. »
Une problématique invisible ?
Selon la chercheuse, la pandémie a par ailleurs accentué le besoin de sécurité de ceux qui vivent une situation précaire.
« Le besoin d’être sécurisé, ce n’est pas quelque chose de tangible, c’est immatériel, mais ces toujours présent pour eux. Ils peuvent vivre comme un sentiment de danger constant. Si, en plus, ils doivent trouver un logement en temps de pandémie, ce sentiment devient encore plus présent. »
Si l’étude s’est attardée à la situation dans la région, c’est que la problématique y est bien enracinée et ce, même si, au point de vue sociodémographique, le secteur est considéré comme aisé si on le compare à d’autres endroits sur la Rive-Sud.
« Les gens sont moins portés à voir les problèmes de pauvreté et de santé mentale dans un milieu plutôt aisé. Nous avons aussi, en quelque sorte, une attitude de résistance face à cette réalité puisqu’il y a une méconnaissance de la problématique. Mais ce n’est pas parce qu’on ne voit pas que ça n’existe pas. »
À titre d’exemple, Mme Benetti mentionne avoir observé, lors de ses visites dans les Centres d’action bénévole, que certaines personnes venues pour de l’aide alimentaire pouvaient conduire des voitures ayant pourtant une certaine valeur.
À juste titre, la chercheuse rappelle par ailleurs que la situation de précarité peut être temporaire et qu’il est important d’avoir un bon filet social pour éviter que ceux qui sont touchés ne soient happés par leurs difficulés au point de ne plus pouvoir en sortir.
« C’est une question de cohésion sociale, affirme-t-elle. Ce sont des gens qui apportent quelque chose à la communauté. Si on les perd, qu’ils doivent s’éloigner dans le cadre d’un exode forcé, c’est une perte pour tous. »
Mixité sociale
Comme envisagé au début de la recherche, l’auteure du rapport croit qu’il faut revoir notre attitude et repenser notre conception du logement social.
« Les gens veulent de la mixité sociale, mentionne Mme Benetti. Ils ne veulent pas être ségrégués, avoir des bâtiments qui leur sont assignés et qui sont identifiés comme étant des logements sociaux pour des personnes avec des problèmes de santé mentale. C’est un aspect incontournable pour eux. Ils veulent être intégrés à la communauté. »
Parmi les solutions à considérer, cette dernière croit par ailleurs qu’il faudrait peut-être considérer de réserver des espaces pour des gens avec des enjeux de santé mentale lors de la conception de nos futurs projets d’habitation.
« Ce sont des citoyens à part entière de notre communauté. On doit les intégrer dans des logements qui sont à proximité des services et facilement accessibles. Et ce n’est pas tout le monde qui ne veut pas intégrer ces personnes, au contraire. Je pense qu’il y a une grande ouverture. »